Malgré une passion pour l'architecture, j'ai fait mes études en économie. Il faut dire que j'aimais aussi les marchés boursiers et c'est le film "Wall Street", sorti en 1987 alors que j'avais 15 ans, qui a tracé mon avenir. Pourtant je ne suis pas un analyste. Je suis bien le dernier à discuter des résultats de Microsoft, ou du ratio d'endettement de Bombardier. Je trouve aussi les microéconomistes d'une naïveté académique incommensurable avec leurs formules mathématiques des courbes d'offre et de demande pour fixer notre prix et trouver un point d'équilibre. La macroéconomie, par contre, où l'on regarde le "big picture", soit les tendances globales et les interactions avec les autres écosystèmes, j'adore ça. Contrairement aux actions, j'aime les indices boursiers qui fluctuent en fonction des données macroéconomiques et avec lesquels on essaie de prévoir les prochaines tendances. J'en ai fait une carrière. Que voulez-vous, je suis un gros macro !
Surplus Quand j'étais petit, j'avais vite compris que quand on dépense moins qu'on gagne, on économise. Ensuite, que ces économies pouvaient être investies et que ces investissements produisaient une deuxième source de revenus. Déjà, je trouvais que même une petite source de revenus était nettement mieux que de payer des intérêts à quelqu'un d'autre.
Par la suite, je me suis mis à imaginer ce qui pourrait se passer si on appliquait ce principe au niveau macro. Qu'arriverait-il si le Québec, son gouvernement ou l'ensemble des citoyens, dépensait moins qu'il ne gagnait ? J'essayais d'imaginer le système bancaire. Est-ce que le Québec pourrait être un pays créditeur et en tirer une deuxième source de revenus ? Est-ce que le gouvernement, au lieu de collecter des taxes, pourrait un jour redistribuer des dividendes aux citoyens ?
La voiture (encore...) Parfois je me promène dans les rues étroites du Plateau. Petits commerces sympathiques, petits cafés ici et là, on vagabonde d'une boutique à une autre. On saute sur un Bixi pour faire 4 rues ou on saute dans le métro pour changer de quartier en 5 minutes. Pourtant les rues sont pleines de voitures garées d'un bout à l'autre. Des voitures qui ne bougeront pas, pour la plupart, du lundi au vendredi. Je regarde ces voitures et tout ce que je vois, ce sont des gens qui dépensent inutilement $1,000 par mois pour avoir "leur" char. Imaginez si vous deviez payer votre voiture à travers un parcomètre. Chaque jour, disons de 9 à 5 du lundi au vendredi (donc environ 180 heures pour le mois), il faudrait aller mettre $5.50 à toutes les heures dans le parcomètre pour payer son char, même s'il est complètement immobile. Depuis notre confinement lié au coronavirus, je vois des voitures immobiles depuis des semaines et qui ne servent qu'à accumuler de la poussière. Mais il faut quand même continuer de les payer...
Comme je considère la voiture comme la pire des dépenses, je me dis aussi que c'est une sortie de fonds massive pour l'économie du Québec. On vend de l'acier en Asie à $500 la tonne et ils nous revendent des voitures qui restent immobiles 95% du temps à $20,000 la tonne. Ça c'est une vraie sortie de fonds ...
En gros
Mais il n'y a pas que les voitures. Prenez par exemple la nourriture. Seulement 10 compagnies contrôlent la majorité de ce que vous consommez. Pepsi, Nestlé, Danone, Kellog, Unilever ... aucune n'est québécoise.
Pour la techno, même sorties de fonds. Apple, Samsung, Microsoft et autres. Très peu de nos dépenses en tech restent au Québec.
On pourrait aussi protéger le secteur de la construction, du moins la partie matériaux, en revenant aux sources. Comme je le disais, passionné d'architecture, j'aime beaucoup Bone Structure qui fait des merveilles, mais rien ne bat selon moi les matériaux nobles de DuChanvre, qui construit à l'ancienne et utilise des matières premières du Québec. Un dollar investit dans DuChanvre, c'est un dollar qui reste ici ...
On est quand même chanceux. Le secteur bancaire est protégé, tout comme les compagnies de télécom ... mais on voit qu'il y a aussi un coût à protéger des industries.
Le Panier bleu Avec cette pandémie, on constate deux choses. De un, notre chaîne logistique dépend beaucoup trop de la Chine. De deux, avec nos sorties de fonds pour notre consommation, on n'est pas en mesure de bâtir un fonds d'urgence pour parer aux chocs économiques.
"Le panier bleu" est une très bonne initiative pour limiter ces sorties de fonds. Avec les récentes pertes d'emplois, espérons que cette initiative encouragera les Québécois à revoir leurs habitudes de consommation et acheter local. Pour le panier bleu, il faut juste améliorer l'expérience client (de beaucoup 😁 ) et offrir un service de livraison efficace ... c'est la livraison qui est le cœur du modèle d'affaire d'Amazon et qui fait son succès.
Le Québec a bon an mal an un déficit commercial de $30 milliards. Les économistes ne s'entendent pas à savoir si un déficit commercial est néfaste ou non mais, dans mon livre à moi, mieux vaut encourager l'économie et les emplois d'ici.
Un fonds d'urgence... pour tous ! Ce qu'on fait au point de vue individuel -le micro- peut aussi se faire au niveau macro. Mais comme les gens en général gèrent très mal leur propre budget, on peut vite comprendre que les gouvernements ne font guère mieux...
La crise que nous vivons présentement nous démontre à quel point trop de gens vivent au jour le jour et que nos dépenses mensuelles, et discrétionnaires, sont souvent trop élevées (encore une fois, merci à la voiture...). On est un peu comme les gouvernements qui cumulent les déficits alors que l'économie est supposée bien aller. Ou un peu comme ces sociétés qui viennent de payer des bonis de performance aux CEO grâce à des programmes de rachats d'actions et qui demandent aujourd'hui des milliards en bailout.
Ce n'est pas le temps de frapper sur quelqu'un qui est déjà par terre, mais nous devrons adresser nos habitudes de consommation après la crise, tant au niveau micro que macro. La crise serait plus facile à traverser si la plupart avait une réserve pour se mettre en "pause" pour 2-3 mois sans crainte, incluant nos compagnies et nos gouvernements !
L'environnement Je vous l'ai déjà dit, je suis assez cynique par rapport à l'environnement (Les millionnaires sont écolos !). Mais force est de constater que cette pause pandémique fait du bien à notre planète. Et ce, en seulement 3 semaines !
C'est drôle mais les gens pensent que faire un petit effort ne changera pas grand chose car ils ne sont qu'une goutte d'eau dans un océan de pollueurs. Et bien ça aussi c'est au niveau micro. Au point de vue macro, preuve à l'appui, si tout le monde fait un petit effort, comme ne pas prendre sa voiture ou consommer selon ses besoins, alors moins d'un mois suffit à redonner un souffle de jeunesse à cette belle planète bleue.
Par exemple, début mars, l'eau des canaux de Venise est redevenue claire et transparente. Même si les nouvelles des cygnes et des dauphins étaient fausses (les cygnes y étaient déjà...), et pour avoir passé quelque temps dans cette ville unique, je peux vous garantir que voir des poissons dans ces eaux habituellement plus que troubles doit être tout un spectacle !
Aussi, la concentration de dioxyde d'azote, ce gaz brun asphyxiant, a baissé à des niveaux records dans de nombreuses villes du monde. Je suis sidéré par cette photo "avant-après" de New Delhi, en Inde.
Le plus drôle, c'est que ça me rappelle les Jeux Olympiques en Chine, alors que j'habitais Hong Kong. Ils avaient fermé des usines dans le sud de la Chine quelques semaines avant les Jeux pour faire baisser le niveau de pollution. Et bien pour la première fois, à partir du centre-ville de Hong Kong, on pouvait voir des montagnes en Chine juste derrière les frontières. Mes collègues Hongkongais n'avaient jamais vu ces montagnes et restaient collés à la fenêtre à les regarder. Enfin, même les sismologues ont noté que la planète tremble moins ! Ils ont noté une baisse du niveau de bruit qui survient habituellement seulement durant les fêtes, et peuvent mieux suivre les activités volcaniques.
Il ne faut plus jamais dire que notre petit geste n'a pas d'impact... si tout le monde se dit ça, effectivement rien ne va se passer. Si tout le monde y met du sien sans se poser de question, par habitude ou par devoir citoyen, on va voir des miracles !
Serrons-nous les coudes Comme pour la pollution, on pense peut-être que faire un petit geste pour le commerce local ne changera pas grand chose. Qu'on est qu'une petite goutte d'eau dans un océan de consommation ...
... on ne peut forcer personne, contrairement à la Covid-19 qui nous force à rester assis sur notre sofa à regarder la télé, mais imaginez si on se dit tous en même temps "aller, je fais ma part. Je vais payer un peu plus cher pour acheter quelque chose de qualité fait ici". Et bien on va voir des miracles ... économiques ! Si l'achat local peut avoir le même effet sur notre économie que le coronavirus en a sur l'environnement, alors serrons-nous les coudes, ça va bien aller !
P.S. Comme pour la plupart d'entre vous, des proches ont été contaminés par le virus. Je veux offrir mes vœux de prompt rétablissement à ceux directement affectés, et une pensée pour les autres à qui je souhaite de bien traverser cette épreuve. J'aimerais vous offrir santé et prospérité mais je l'ai fait en janvier. Je révise d'ailleurs les cartes de tous ceux qui m'ont souhaité bonne année il y a quelques mois. Je vous reviens là-dessus d'ailleurs car jusqu'à maintenant ...
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